Texte co-rédigé en collaboration avec Andréas Louis (Analyste en environnement au GRAME 2021-2022).
Au cœur de l’urgence climatique, des solutions concrètes peuvent être mises en place dès maintenant dans toutes les sphères de la société. C’est sur quoi se penche le troisième volet du 6e rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), publié le 4 avril 2022. On y retrouve une synthèse de pistes d’actions basées sur 18 000 articles scientifiques. Dans l’article suivant, voyez les points clés à retenir.
Les émissions de gaz à effet de serre peuvent (et doivent) diminuer
Durant la dernière décennie, les émissions de tous les types de gaz à effet de serre (GES) ont été plus élevées que dans les décennies précédentes.
Ce graphique retrace les niveaux de différents types de GES en CO2 équivalent1 depuis le premier rapport du GIEC, publié en 1990. Les émissions de tous les GES ont augmenté, et les principaux gaz émis par l’humain dans l’atmosphère sont le dioxyde de carbone (CO2) (64 %) et le méthane (CH4) (18 %).
Source : IPCC AR6 WGIII, Figure SPM.1
Changements climatiques : vecteur d’inégalités sociales
Les pays développés sont les plus grands responsables du réchauffement climatique. En moyenne, en Asie du Sud, chaque habitant émet 2,6 tCO2-éq par an, alors qu’en Amérique du Nord, ce chiffre est de 19 tCO2-éq. Au Canada, les émissions de GES par habitant sont 2,6 fois plus élevées que la moyenne des pays du G20.
Le GIEC propose des projections selon les différents scénarios d’émissions de GES :
- Pour maintenir le réchauffement climatique sous la barre des 1,5°C par rapport aux niveaux de l’ère pré-industrielle (1850-1900) – cible fixée lors de l’Accord de Paris -, toutes les émissions devraient cesser d’augmenter d’ici 2025 et devraient ensuite diminuer de 43 % d’ici 2030 par rapport à 2019.
- Les engagements actuels des pays ne permettent pas d’atteindre ces objectifs, mais les solutions proposées par le GIEC ont le potentiel de réduire d’au moins 50 % les émissions de GES dans les différents secteurs d’activité.
Le graphique à gauche montre les variations de GES des tendances des politiques actuelles en rouge, alors que la courbe bleue montre la projection si on limitait le réchauffement à 1,5°C.
Source : IPCC AR6 WGIII, Figure SPM.4
Pour limiter les changements climatiques, les solutions proposées par le GIEC se situent à différents niveaux : changements des modes de vie (individuel et sociétal), adaptation des infrastructures (gouvernements, villes, entreprises) et avancées technologiques.
Gouvernements et entreprises : une transition nécessaire vers les énergies vertes
Un point phare du rapport du GIEC est la nécessité d’abandonner les énergies fossiles et de transitionner vers des énergies bas carbone. Actuellement, les projets en cours et planifiés d’énergies fossiles font dépasser la barre du réchauffement à 2°C. La transition implique donc :
- Abandonner une partie des infrastructures existantes qui utilisent des énergies fossiles;
- Arrêter de financer les nouveaux projets de charbon, de pétrole ou de gaz;
- Favoriser les énergies solaires et éoliennes, qui ont le plus grand potentiel d’impact. De plus, entre 2010 et 2019, le coût de l’énergie solaire a diminué en moyenne de 85 % et celui de l’énergie éolienne de 55 %.
Le graphique suivant montre l’évolution du prix et du développement de certaines énergies renouvelables depuis 2000, en comparaison au prix des énergies fossiles.
Source : IPCC AR6 WGIII, Figure SPM.3
D’autres pistes sont également à considérer, telles que :
- Améliorer l’efficacité énergétique des bâtiments.
- Arrêter la déforestation, faire de la reforestation et de l’afforestation – c’est-à-dire la conversion de terres agricoles dégradées en forêts, créant ainsi une nouvelle forêt qui n’existait pas avant -, instaurer de meilleures pratiques agricoles et mieux protéger la biodiversité, puisque les écosystèmes naturels demeurent la meilleure façon de capter le CO2 dans l’atmosphère à court et moyen termes.
- Mettre en place des technologies de captation de carbone à plus long terme, mais ne pas compter uniquement sur ces technologies pour réparer les dommages des activités humaines.
L’urbanisme est à repenser, et les villes sont des acteurs clés !
Plus de la moitié de la population mondiale habite dans une zone urbaine. Pour limiter le réchauffement climatique dans les villes, nous devons miser sur des espaces urbains plus compacts, verts et durables. Parmi les axes d’action proposés par le GIEC, on retrouve :
- Aménager les villes pour favoriser les transports en commun, ainsi que les déplacements à vélo et à pied;
- Favoriser le verdissement;
- Construire des bâtiments de façon plus durable et miser sur des rénovations qui améliorent l’efficacité énergétique;
- Privilégier des infrastructures plus denses;
- Mettre en place des mesures pour inciter les citoyens à changer leurs habitudes.
Chaque individu a aussi son rôle à jouer
Le rapport propose des stratégies pour réduire la consommation finale de biens et services qui permettraient de réduire les émissions de 40 % à 70 %. Sur le plan individuel, voici le potentiel d’impact de différentes actions :
Crédit graphique : The Shifters
Les changements de mode de vie qui peuvent avoir le plus grand impact selon le GIEC pour baisser les émissions de GES sont ceux qui se rapportent à la mobilité, principalement :
- Vivre sans voiture et privilégier la mobilité durable (transport à pied, à vélo ou en transports en commun);
- Privilégier les véhicules électriques et légers;
- Réduire les voyages en avion.
De plus, les actions individuelles ont aussi un impact pour réduire les émissions liées à l’alimentation, par exemple :
- Manger moins de viande et autres produits d’origine animale;
- Favoriser l’agriculture locale;
- Éviter le gaspillage alimentaire.
Quels choix alimentaires sont favorables pour l’environnement?
Le rapport du GIEC signale que les régimes majoritairement à base de plantes, avec des produits d’origine animale provenant d’installations résilientes et durables, présentent un plus grand potentiel de mitigation. La distance parcourue par les aliments est également un facteur à prendre en compte pour réduire l’empreinte écologique liée à l’alimentation.
Les actions individuelles en elles-mêmes ne sont pas suffisantes, des changements de fond doivent avoir lieu. Elles sont toutefois un élément essentiel à l’instauration de nouvelles normes sociales et à la création d’un mouvement collectif.
Des solutions porteuses à long terme
Globalement, par rapport aux finances, on investit de 3 à 6 fois moins que ce que l’on devrait pour limiter les changements climatiques. Pourtant, les mesures pour limiter le réchauffement à 2 °C coûteraient moins chères que les dommages découlant de l’inaction.
Le graphique suivant détaille les dépenses actuelles en comparaison aux dépenses nécessaires dans les différents secteurs.
Les investissements pour l’action climatique sont donc à considérer dans une optique de long terme, qui bénéficiera au plus grand nombre.
En plus des avantages économiques, les atténuations liées aux impacts des changements climatiques sont favorables sur plusieurs plans. Elles améliorent la qualité de l’air, la santé des individus, ainsi que la conservation de la biodiversité, entre autres.